Sainte Famille ILE Maurice dimanche 31 décembre 2023

 

Cet évangile nous parle de la purification de Notre Dame, puis de la présentation de Jésus au Temple, avant de nous faire part des réactions étonnantes d’Anne et de Syméon. Selon les prescriptions du Lévitique, Marie se soumet aux rites de purification imposés à toute nouvelle accouchée. Et comme dans la religion juive, le premier né n’appartient pas à ses parents mais à Dieu, Marie et Joseph viennent offrir le sacrifice prescrit pour le rachat de l’enfant : un couple de tourterelles ou deux petites colombes. (Lev.12,8) C’est là une démarche privée qu’accomplit toute famille de bons pratiquants.

Mais les propos de Syméon et d’Anne vont donner une résonance imprévue à ce qui n’était qu’une cérémonie familiale privée. Eclairés par l’Esprit Saint, ils proclament que l’enfant présenté par Marie et Joseph est le Messie attendu par les Juifs  et que ce messie est envoyé à toutes les nations. Ils le présentent comme le salut préparé à la face des peuples, lumière pour éclairer les nations païennes et gloire pour le peuple d’Israël. Pour tout bon Juif, ces paroles qui annoncent un Messie venu apporter la lumière aux nations païennes et un salut à tous les peuples, sont choquantes. On  pensait alors que le Messie ne viendrait que pour les Juifs, peuple choisi, avec qui Yahvé qui avait fait alliance aux jours d’Abraham…

On n’était pas absolument opposé à la possibilité d’un salut pour les païens, mais à condition qu’ils passent à la religion juive. On racontait avec complaisance la conversion de Ruth, la Moabite ou d’Achior, l’Ammonite, environ mille ans avant J.C. et on faisait bon accueil aux païens convertis qu’on appelait prosélytes, mais en même temps on se tenait à l’écart des païens, car on redoutait que leur mentalité et leurs cultes ne corrompent la pureté religieuse juive. Au début de son ministère,  Jésus recommande encore à ses apôtres de ne pas prendre le chemin des païens, de ne pas entrer dans une ville des Samaritains et d’aller plutôt vers les brebis perdues de la maison d’Israël (Mt.10,5). Mais rapidement, devant la mauvaise volonté des brebis perdues d’Israël, il ne ménagera pas son admiration pour les  étrangers qui croient en lui : le centurion romain, le lépreux samaritain, la cananéenne. Il ira même jusqu’à dire que les étrangers venant du levant  et du couchant prendront place au festin du royaume, tandis que les héritiers du royaume seront jetés dehors. (Mt.8,11). Les propos d’Anne et de Syméon étonnent doublement. Non seulement ils annoncent que le messie est arrivé maisils insistent pour dire que le Messie ne vient pas uniquement pour les Juifs, mais aussi pour toutes les nations.

 Et la suite  de leurs propos va prendre une tournure inquiétante : Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction, et toi,  (Marie) ton âme sera transpercée d’un glaive_ ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent au coeur d’un grand nombre. Le glaive de douleur qui transpercera le coeur de Marie, on voit bien ce que cela veut dire : elle souffrira de voir Jésus rejeté, elle sera avec lui dans toutes ses épreuves jusqu’au calvaire, où elle assistera, debout au pied de la croix, à la mort de son fils. Mais pourquoi Jésus causera-t-il la chute des uns et le relèvement des autres ? C’est moins clair. On comprend bien que ceux qui accueilleront les parole de salut  et les mettront en pratique seront sauvés, mais et-ce qu’il faut comprendre que ceux qui n’accueilleront pas ces paroles seront perdus ? Et comment se fait-il que les Juifs qui pourtant attendaient le messie ne l’ont pas accueilli ? Et comment se fait-il qu’aujourd’hui encore beaucoup ne l’accueillent pas ? Certains contemporains de Jésus avaient une certaine idée de la religion, de Dieu, du Messie à venir et ne voulaient pas en démordre. Lorsqu’il a commencé à enseigner, ils ont refusé d’accepter son enseignement. Pourquoi ? Parce que cet enseignement les dérangeait. Ils voulaient en rester à leur façon de voir les choses.    

Aujourd’hui si beaucoup autour de nous ne reçoivent pas le Christ et son évangile, c’est pour les mêmes raisons. On ne veut pas être dérangé. On a son travail, ses occupations ses soucis ; sa famille, ses amis et même sa religion. On n’a pas beaucoup le temps de réfléchir, on court d’une occupation à l’autre. On n’arrive pas à tout faire. Il n’y a pas de place pour incorporer des nouveautés qui bouleverseraient le programme surchargé de nos journées. Ce n’est pas qu’on soit opposé au Christ et à son évangile, mais on n’a pas le temps de s’occuper de ça, on est pris par autre chose. Et puis la venue d’un Dieu  apportant le salut et la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté.. ;quand on voit tout ce qui se passe….. les drames à nos portes, la misère , les injustices et plus loin dans le monde les conflits à Gaza, en Ukraine, en Ethiopie, au Soudan, au Nigeria, etc…On finit par se dire que Noël, la venue d’un sauveur, tout ça  c’est trop beau pour être vrai, ça ne  peut être que de la légende, on n’y croit plus.

Alors est-ce que ceux qui n’accueillent pas le Seigneur sont irrémédiablement perdus ? Certaines paroles du Seigneur peuvent le laisser penser, par exemple lorsqu’il dit : Si je n’étais pas venu, si je ne leur avais pas adressé la parole, ils n’auraient pas de péché, mais à présent leur péché est sans excuse (Jean15,22) A moins que, encore une fois, in extremis, le Seigneur n’intercède pour nous : Père, pardonne -leur, ils ne savent pas ce qu’ils font (Luc22,34). Que fera le Seigneur ? Nous n’en savons rien. Nous, au moins, tâchons de bien écouter pour comprendre ce qu’il dit. Et si malgré tout nous n’arrivons pas à voir clair, demandons lui simplement comme  St François d’Assise:Seigneur, que veux-tu que je fasse ? Parce que Noël, c’est Dieu avec  nous, alors nous, débrouillons nous pour rester avec lui.

Que retenir de tout cela ?

Joseph et Marie sont arrivés au Temple pour, selon les prescriptions de la Loi, accomplir la purification à laquelle tout nouvelle accouchée devait se soumettre et présenter leur enfant au Seigneur. Mais voilà que Syméon, éclairé par l’Esprit Saint, proclame qu’on est en train d’assister à l’arrivée du Messie venu apporter le salut à toutes les nations. Du coup, ce qui devait être une simple cérémonie privée devient la proclamation solennelle d’un salut offert à tous les hommes.

Cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël.Ceux qui accueilleront ce salut seront sauvés. Ceux qui ne l’accueilleront pas seront-ils irrémédiablement perdus ? L’évangile nous donne de bonnes raisons de le penser, à moins qu’à la dernière minute, le Christ n’étende sur eux le manteau de sa miséricorde. Que décidera-t-il de faire? Nous n’en savons rien . L’évangile nous invite à saisir notre chance, à tout faire pour écouter la voix du Seigneur. Son Esprit est en nous pour nous guider et pour  nous permettre d’ aider les autres à trouver le bon chemin. Nous pouvons avancer sans inquiétude. On ne saurait trouver de meilleur GPS.