Chers frères et sœurs,
Comme les dimanches précédents, l’évangile que nous venons d’entendre se situe dans le Temple, dans le cadre de l’affrontement verbal entre Jésus et ses adversaires après qu’il a chassé les vendeurs de ce lieu saint.
Aujourd’hui, ce sont les pharisiens qui s’entourent des hérodiens pour lui tendre un piège. Après des flatteries qui l’invitent à parler franchement pour dire la vérité sans se laisser influencer par personne, ils lui posent la question : « Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à César, l’empereur ? ». La question est fléchée, les pharisiens veulent qu’il réponde oui ou non. S’il répond oui, il est un collaborateur de Rome et ne peut être le Messie. S’il répond non, les hérodiens, dont le pouvoir dépend des romains peuvent le dénoncer à eux.
Jésus comprend le piège et les démasque directement :« Hypocrites ! ». Puis il les renvoie à eux-même en les confrontant aux pensées de leur propre cœur : « pourquoi voulez-vous me mettre à l’épreuve ? »
Ensuite, demandant qu’on lui montre une pièce de monnaie, il leur répond de manière pragmatique et néanmoins très profonde.
Pragmatiquement, en leur faisant sortir une monnaie et reconnaitre l’effigie de César dans l’enceinte du Temple, où les images humaines n’étaient pas permises, il leur fait reconnaitre qu’eux-mêmes utilisent la monnaie de César, et donc reconnaissent et vivent sous son pouvoir. En leur disant « rendez à César ce qui est à César » Jésus reconnait la légitimité du pouvoir politique qui a été remise par Dieu à une autorité terrestre pour organiser la société et promouvoir le bien commun. C’est le sens de la première lecture dans laquelle Isaïe affirme que c’est Dieu qui a remis un titre à l’empereur Cirus. Si le pouvoir politique est confié par Dieu, payer l’impôt à César n’est pas un acte d’idolâtrie.
Cependant de manière plus profonde, derrière l’affirmation « rendez à César ce qui est à César » Jésus veut dire également « ne rendez à César QUE ce qui est à César » c’est-à-dire l’organisation du bien commun. C’est le sens de l’affirmation « rendez à Dieu ce qui est à Dieu ». Dieu est l’unique, qui seul mérite notre adoration. Dieu est le créateur auquel nous appartenons. Adorer les idoles de l’argent, du pouvoir, de l’orgueil, c’est refuser de rendre à Dieu ce qui lui appartient, nous-mêmes, qui sommes invités à rendre gloire à Dieu par notre vie.
En réfléchissant au sens des deux baptêmes de … et … dans quelques instants j’ai pensé à la lecture traditionnelle de cet évangile qu’on fait de nombreux pères de l’Église. Pour eux, il existe une autre monnaie frappée d’une image, cette monnaie c’est nous-même. Avant même notre baptême, nous partageons avec tous les humains d’être créés « à l’image de Dieu » (Gn 1,27) et de lui appartenir. Dieu a imprimé sa marque de fabrique en tout être humain, croyants de toutes les religions ou non. Mais cette image doit devenir visible par notre vie et cela c’est le propre des chrétiens. Nous sommes chrétiens pour rendre gloire à Dieu, le rendre visible par notre vie. Et celui qui nous permet de rendre visible l’image de Dieu, c’est Jésus, l’image du Dieu invisible (Col 1,15). Dans quelques instant la vie de Jésus va être déposée dans le cœur de ces enfants par le baptême. Vous parents, parrains et marraines prenez aujourd’hui l’engagement de prendre soin de la vie de Jésus en ces enfants. Cela implique de les aider à le connaitre progressivement par l’exemple de votre vie, par l’enseignement de la foi en famille, par la participation au catéchisme. Cela implique de les aider peu à peu à développer leurs talents et capacités humaines, à collaborer à la vie de l’Esprit Saint qui va venir demeurer en eux dans quelques instants. C’est une lourde responsabilité. Il s’agit de former non seulement des citoyens, qui rendront à César ce qui est à César, en cherchant le bien commun avec tous les humains de bonne volonté, mais il s’agit aussi de leur permettre de rendre à Dieu, ce qui lui appartient, la gloire de notre vie.
Et nous tous ici rassemblés demandons nous si nous rendons à Dieu ce qui lui appartient : nous-mêmes.
Amen.