23e dimanche du temps ordinaire, année B. Isaïe (35,4-7) Jacques (2,1-15) Marc (7,31-37)
Bien sûr, la guérison de ce sourd-muet est un geste de bonté du Seigneur, bouleversé de voir la souffrance de cet homme et touché par la démarche de ce gens qui le supplient de guérir ce malheureux. Mais pas seulement, car le but de Jésus lorsqu’il fait un miracle est toujours de donner à travers un prodige ou une guérison, un signe, le signe que le Messie est arrivé, que Dieu est présent au milieu de nous. Il a toujours peur que les témoins du miracle s’arrêtent au prodige et n’aillent pas jusqu’à voir le signe de la présence de Dieu parmi eux, il sait également que les Juifs, dans leur conception très terrestre du messianisme croyaient que le Messie quand il viendrait supprimerait toute souffrance et instaurerait une sorte de paradis sur terre. C’est la raison pour laquelle, il essaie d’agir le plus discrètement possible, quand il fait un miracle, entraînant les malades à l’écart avant de les guérir et demandant qu’on ne parle pas de la guérison opérée. Mais cela ne marche pas ! Malgré cette consigne de silence, on dit partout et de plus en plus : Il a bien fait toutes choses, il fait entendre les sourds et parler les muets.
Or pour Jésus, faire des miracles, c’est, au-delà d’une manière de soulager la souffrance humaine, une façon d’exercer sa mission de Messie. C’est l’occasion de donner un enseignement. Pour Jésus, un miracle, c’est une prédication par gestes. Rendre la vue à un aveugle, c’est une manière de dire par gestes : Je suis la lumière du monde. (Jean, 8, 12) Multiplier les pains, c’est une manière de dire par gestes : Je suis le pain de Vie. (Jean 6,48) Ressusciter un mort, c’est une manière de dire par gestes : Je suis la Résurrection et la Vie. (Jean 11, 25) Pour Jésus, chaque miracle est, pour ceux qui en sont les témoins un signe, une illustration, une preuve que le Royaume est arrivé parmi eux.
Pour nous aujourd’hui, quel enseignement y a-t-il dans cette page d’évangile ? Attention ! un train peut en cacher un autre ! Les plus anciens parmi vous se rappellent certainement de ce panneau indicateur qu’on pouvait voir autrefois sur les quais des gares. On pourrait dire ici : attention ! un miracle peut en cacher un autre ! Le miracle de la guérison du sourd-muet peut cacher un autre miracle, plus important celui-là : le miracle de la présence de Dieu au milieu de nous. Nous risquons de nous arrêter au prodige : guérison d’un malade, multiplication de pains et nous ne voyons pas le plus grand prodige que représente la présence de Dieu parmi nous. Nous risquons de ne pas voir au-delà du bienfait humain du miracle, le bienfait spirituel supérieur que le Christ veut nous apporter à travers ce bienfait humain.
Pensez à la réaction de la foule après la multiplication des pains. Tout heureux d’être rassasiée, elle veut s’emparer de Jésus pour le faire roi ! Elle ne voit pas du tout le but du Seigneur qui veut, à travers les pains multipliés, lui signifier qu’il est le Pain de Vie. Jésus le lui reprochera le lendemain, quand elle l’a rejoint de l’autre côté du lac : Ce n’est pas parce que vous avez vu des signes que vous me cherchez, mais parce que vous avez mangé des pains à satiété. (Jean 6,26)
Dans notre foi maladroite, nous avons pleine confiance que le Seigneur peut nous donner les bienfaits matériels, humains que nous désirons mais nous oublions que le Seigneur de son côté désire aussi nous donner d’autres bienfaits d’un ordre supérieur, spirituels. Dans notre foi maladroite nous avons pleine confiance qu’il peut nous donner les sandwiches au beurre et à la confiture que nous lui demandons et nous sommes prêts à les recevoir avec reconnaissance, mais le pain de vie que lui veut nous donner ………… ?
Comme si Dieu était là seulement pour guérir nos maladies, nos aveuglements, nos surdités, nos paralysies ! Est-ce qu’il n’a pas pour nous d’autres désirs, d’un ordre supérieur, ceux-là, d’ordre spirituel ? Qu’est-ce qu’il veut ? Il veut nous unir à lui, pour que nous soyons comme lui, pour que nous soyons d’autres lui, d’autres Christs. C’est St Irénée qui a le mieux exprimé les désirs, les ambitions de Dieu pour nous avec sa formule célèbre Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu. Il veut, nous transformer en lui, faire de nous des êtres nouveaux en Jésus Christ, en vue des œuvres bonnes qu’il a préparées à l’avance pour que nous les accomplissions comme dit St Paul (Ephes.3,20), des êtres capables, comme lui et avec lui, de faire advenir le royaume de Dieu, de transformer notre monde plein d’orgueil, d’égoïsme et d’injustice en un royaume de paix, de justice et de charité..
Mais nous ne voyons pas si loin. Et les contemporains de Jésus non plus ne voyaient pas si loin. Quand ils l’approchaient, qu’est-ce qu’ils cherchaient ? A être guéris d’une maladie, ils demandaient son aide dans les épreuves. Et nous autres aujourd’hui qu’est-ce que nous demandons au Seigneur dans nos prières ? A peu près la même chose. Nous demandons la santé, la paix, la bonne entente dans nos familles, de réussir l’éducation et la formation de nos enfants, nous prions pour la paix et la justice dans le monde. Et nous avons bien raison, nous avons le plus grand besoin de son aide. Il n’y a rien là de condamnable. Au contraire. Cela manifeste notre confiance en celui qui nous a dit : Demandez et vous recevrez (Jean 16,24) Votre Père sait ce dont vous avez besoin avant même que vous le lui demandiez. (Mt.6,8) Mais notre tort c’est de ne pas lui demander aussi ce que lui veut nous donner et qui est infiniment supérieur à ce que nous lui demandons. Nous lui demandons de s’abaisser à notre niveau sans penser que lui voudrait nous hisser jusqu’à son niveau, c’est-à-dire nous mettre en état de communion avec lui…..Nous lui demandons ce que nous pensons être le mieux pour nous. Mais est-ce que lui ne sait pas, mieux encore que nous, ce qui est le meilleur pour nous ?Alors osons repousser à plus tard nos demandes à nous et comme le Seigneur nous l’a enseigné osons demander d’abord :que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite partout sur la terre comme elle est faite au ciel parce que quand dans nos familles et dans notre monde son nom est sanctifié, son règne advient et sa volonté est réalisée, c’est alors que le bonheur s’y établit. Mais croyons-nous vraiment que le Seigneur sait mieux que nous ce dont nous avons besoin ? Croyons-nous vraiment qu’il nous aime mieux que nous ne nous aimons nous-mêmes ? Croyons-nous vraiment, comme dit St Paul que sa puissance agissant en nous peut faire bien plus, infiniment plus que tout ce que nous pouvons désirer ou imaginer ?(Ephes.3,20) Puissions-nous être capables de faire en toute sincérité cette prière que je vous ai déjà citée mais que je cite encore aujourd’hui en terminant :
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Mon Dieu, Mon Dieu,
N’écoute pas ma prière, N’écoute pas ma prière,
Même si ce qu’elle te dit Mais fais en moi ma prière,
Est bien. Et puis écoute
Toi, ce que tu veux me dire Ecoute en moi
Est tellement mieux ! Ta prière.
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Mon Dieu, Et surtout,
N’écoute pas ma prière, Mon Dieu,
Même si ce qu’elle te demande Fais que j’écoute,
Est bon. Que toujours,
Toi, ce que tu veux me donner J’écoute en moi
Est tellement meilleur ! Ta prière.