3 e dimanche de Pâques (Actes 5, 27b-32. 40b-41) (Apoc.5, 11-14) (Jean 21, 1-19)
Nous sommes quelques jours après Pâques. Les apôtres ont quitté Jérusalem et sont rentrés en Galilée. Ils ont repris leur métier de pêcheurs. Justement ce matin-là, alors qu’ils ont pêché toute la nuit sans rien prendre, quelqu’un, sur le bord du lac les hèle, leur demandant un peu de poisson. Comme ils lui répondent qu’ils n’ont rien, il leur dit de jeter leur filet sur la droite. L’ayant fait, ils pèchent aussitôt une telle quantité de poisson, qu’ils ont de la peine à tirer le filet à bord. Cela est tout-à-fait anormal parce que c’est de nuit lorsque le poisson remonte des profondeurs, qu’il se prend dans les mailles des filets tendus en rideau depuis la surface. Mais au lever du jour, le poisson s’enfonce dans les profondeurs, les pêcheurs n’ont plus aucune chance de prendre quoi que ce soit ! Devant cette prise exceptionnelle, St Jean a réalisé tout de suite : C’est le Seigneur ! Aussitôt Simon se jette à l’eau pour rejoindre Jésus suivi par les autres apôtres qui traînent le filet plein de poisson. On peut imaginer leur joie de revoir Jésus. Nous sommes dans ce temps « intermédiaire » entre Pâques et l’Ascension où Jésus n’est pas encore retourné définitivement auprès du Père, mais n’est plus à plein temps parmi les hommes. Il leur apparaît seulement de temps en temps. Mais ils ne sont pas au bout de leur surprise…..et nous non plus. Descendus à terre, les apôtres découvrent un feu de braise avec du poisson déposé dessus et du pain. Et Jésus les invite: Venez déjeuner. Question : Qui a préparé le repas ? On a un Bon Dieu qui fait la cuisine. ! Un tas de gens s’imaginent que le Bon Dieu est loin, tout là-haut, dans le ciel, pour ne pas dire dans la lune ! et qu’il a autre chose à faire qu’à penser à nos petites histoires. Eh bien, non ! le Seigneur est près de nous Quand il veut apparaître à ses apôtres, il ne leur apparaît pas à l’église, dans le Temple, revêtu d’ornements sacerdotaux, au beau milieu d’une cérémonie officielle où on chante plein de psaumes, non, il les retrouve là où ils sont tous les jours, en train de faire leur métier de pêcheurs et il les invite à un barbecue sur la plage au bord de la mer ! Là encore il est déconcertant. Comme toujours. Les Juifs s’attendaient à voir le Messie apparaître comme un personnage imposant proclamant son enseignement depuis le parvis du Temple. C’est un petit bébé qui se présente. On s’attendait à le voir fréquenter les Docteurs de la Loi, les Scribes, les Grands Prêtres. En réalité, il n’a pas beaucoup de sympathie pour eux, il est plutôt anticlérical ! Par contre on le voit souvent avec des pécheurs publics, des fonctionnaires plus ou moins corrompus comme Zachée ou des femmes de mauvaise vie comme Marie Madeleine. Il est passé en faisant le bien, mais il est arrivé à se mettre tout le monde à dos. Il a fini condamné à mourir sur une croix, supplice réservé aux esclaves. Une fois ressuscité, il n’a pas cherché à se montrer à Pilate, à Hérode ou au Sanhédrin pour faire casser son procès. Il apparait discrètement à quelques femmes et toujours aussi discrètement aux apôtres qui se cachent, enfermés par crainte des Juifs. Jamais il ne leur apparaît dans un cadre un peu solennel au temple de Jérusalem, ou dans une synagogue où ils seraient en train de prier. Il les surprend alors qu’ils sont en train de manger ou de marcher sur le chemin d’Emmaüs ou encore, comme ici, en pêche sur le lac, dans l’ordinaire de leur vie, dans le banal de leurs tâches quotidiennes. Nous voilà prévenus. Ce n’est pas exclu que le Seigneur vienne à notre rencontre quand nous sommes à l’église. Cela nous est arrivé à tous qu’une parole nous touche dans la liturgie de la messe, dans l’homélie ou dans le recueillement d’un moment de prière, mais le Seigneur peut très bien nous visiter lorsque nous sommes au travail, dans la rue, au supermarché ou au volant de notre voiture. Et chaque fois qu’il vient, ce n’est pas seulement pour dire un petit bonjour en passant, il vient pour renouveler son appel, comme nous le voyons dans le récit de cette apparition où après la pêche miraculeuse et le repas qui l’a suivie, de nouveau, il demande à nouveau à Pierre de prendre en charge le troupeau : Sois le berger de mes brebis. Le Christ ressuscité ne commence pas au matin de Pâques une existence de jeune retraité. Il se lance au contraire et lance avec lui ses apôtres dans une nouvelle croisade. Par trois fois il amène Pierre à renier son reniement et le place à la tête d’une nouvelle campagne d’évangélisation qui reposera non pas sur une quelconque puissance mais sur la force irrépressible de l’amour.D’où l’insistance de Jésus à demander à Simon-Pierre : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu vraiment ? Nous aussi aujourd’hui le Christ nous lance dans cette nouvelle croisade où forts de la vie du Christ ressuscité vivant en nous depuis notre baptême nous avons à changer un monde d’injustice, de violence et de haine en un royaume de paix de justice et d’amour. Que retenir de tout cela ?Sa nouvelle existence de ressuscité, le Christ n’entend pas la garder pour lui tout seul. Il entend bien la partager avec nous. Il ne reste pas dans les hauteurs de sa toute puissance. Sans attendre, il rejoint ses disciples dans leur quotidien, il vient les surprendre au retour de la pêche, les invite à un barbecue sur la plage et les envoie avec Pierre à leur tête répandre partout l’existence ressuscitée qui vient de commencer en lui. Comme Jésus a rejoint ses apôtres là où ils étaient, en train de pêcher, il nous rejoint aujourd’hui là où nous sommes et nous envoie répandre partout autour de nous l’existence ressuscitée où il vient d’entrer. Au matin de Pâques, le Christ ressuscité n’entre pas dans une existence de jeune retraité. Il lance une nouvelle croisade dans laquelle il nous appelle tous à œuvrer avec lui dans le monde d’injustice de violence et de haine qui est le nôtre, pour en faire un monde de paix de justice et de charité