4° Dimanche de Carême Luc 15,1-3, 11 32
Un homme avait deux fils…
Les scribes et les pharisiens avaient de bonnes raisons de récriminer. Jésus avait des manières de faire choquantes. Toujours fourré avec les pécheurs, il fréquentait des dissidents comme les Samaritains, et s’approchait des intouchables que sont les lépreux et les possédés d’esprits impurs. On le voyait même adresser la parole à des femmes pas très recommandables Par contre il regardait de travers les prêtres et mettait plus bas que terre les scribes, les docteurs de la Loi et les pharisiens. Un tel non conformisme et un anticléricalisme aussi caractérisé ne pouvaient que heurter et provoquer des réactions de méfiance sinon d’hostilité chez les scribes et les pharisiens qui se croyaient justes et irréprochables. Le Messie d’après eux devait être un justicier implacable qui écraserait leurs opposants Ils n’aimaient pas entendre Jésus enseigner que Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par Lui. (Jean 3,17 ). Avec la parabole du Fils prodigue, Jésus essaye, une fois encore, de faire comprendre que le Messie n’est pas venu pour condamner mais pour sauver ce qui était perdu, et en même temps, il nous donne un enseignement lumineux sur la tentation, sur le péché sur le repentir et surtout cette parabole nous éclaire sur le pardon et l’attitude de Dieu vis-à-vis du pécheur.
La parabole du fils prodigue montre bien comment dans la tentation, le démon nous trompe. Il dissimule le mal, il cache au fils prodigue la souffrance qu’il va causer à son père et à toute la famille et présente le mal comme quelque chose de bien et de bon, d’agréable et de profitable. Vas y, laisse tomber la famille, tu ne fais rien de mal, tu ne voles rien à personne, ton héritage, c’est à toi.Tu es jeune, tu as bien le droit d’en profiter et de faire la fête . Ilcache également au prodigue les conséquences du mal, il lui cache qu’il va se retrouver dans la misère quand il aura dilapidé son héritage. Dans la tentation le démon parvient à nous faire croire que le mal est un bien, quelque chose de bon et de profitable.
La parabole du fils prodigue nous montre aussi que le péché, présenté par le diable sous des aspects attrayants, en plus d’être une offense envers Dieu qui nous aime, se révèle toujours catastrophique pour le pécheur. Ainsi que le Seigneur nous l’enseigne déjà dans Jérémie Est-ce bien moi qu’ils blessent, n’est-ce pas plutôt eux-mêmes pour leur propre confusion ? (Jer.7,19) Le fils prodigue se retrouve obligé de garder les cochons, le pire qui puisse arriver à un Juif pour qui les porcs sont des animaux impurs Il touche le fond de la misère.
Mais sous l’impact de la réalité qui s’impose à lui cruellement, les mirages de la tentation s’estompent, il reprend pied dans le réel et s’engage dans la voie du repentir. Onpeut distinguer trois niveaux dans ce repentir. hors de soi. Le premier niveau du repentir nous fait reprendre pied dans la réalité. Le fils prodigue rentra en lui-même, il reprit ses esprits, comme si dans le temps de latentation on avait perdu perdu son bon sens et son jugement comme si on était en dehors de soi. Il voit : je me suis laissé avoir. J’ai cru que ce serait mieux pour moi d’aller faire la fête avec mes amis plutôt que de rester travailler avec mon père. Maintenant je vois que j’ai mal fait. J’ai offensé mon père en l’abandonnant alors qu’il ne m’a fait que du bien depuis que je suis tout petit. Et je n’ai récolté que du malheur.
Le deuxième niveau du repentir conduit le fils prodigue à un sentiment de regret et à présenter des excuses à son père : Je vais aller vers mon père et je lui dirai :Père j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Cela lui a demandé un sérieux effort de volonté.
Enfin, troisième niveau, le repentir va plus loin qu’une contrition qui même sincère reste tournée vers le passé, il nous amène à un changer de vie à l’avenir. Le fils prodigue décide de se remettre au travail et de demander à son père Traite moi comme un de tes ouvriers . Son repentir qui jusque là restait tourné vers le passé se transforme en conversion engageant l’avenir.
Mais le plus important et le plus beau dans cette parabole, c’est l’attitude du père. Il aurait plus de motifs qu’il n’en faut pour se montrer sévère et vouloir punir son fils qui l’a tant fait souffrir. Pas du tout, le pauvre prodigue n’a même pas le temps de finir son petit discours d’excuses, son père lui coupe la parole et l’embrasse, il se retrouve habillé de neuf, des sandales au pied, une bague au doigt, signe de son rang de fils recouvré, et tout le monde passe à table pour le festin des retrouvailles. Pas question d’expiation ou de sanction, pas la moindre condamnation. Pas de temps à perdre avec tout ça. Son amour pour son fils balaye toute velléité de reproches. Il est tout à la joie de voir son fils de retour dans l’intimité familiale. Le Christ veut ici nous faire comprendre que notre Père du ciel est dans les mêmes dispositions envers nous. Il ne cherche pas à nous juger, à nous punir ou à nous condamner. Quels que soient nos torts et nos offenses envers lui, dès que nous revenons vers lui, il nous accueille, tout à la joie de nous voir revenir Je vous le déclare, dit le Seigneur il y a plus de joie au ciel pour un pécheur qui se convertit que pour 99 justes qui n’ont pas besoin de conversion. (Luc15,7)
Le fils aîné lui ne comprend pas cette logique là. Il pense que son frère dévoyé ne mérite pas d’être ainsi accueilli. Sommes nous meilleurs que ce fils aîné ? Pas sûr !!! Supposons que Poutine se convertisse. Quelle tête ferions nous en le retrouvant à côté de nous au ciel ?
Que retenir de tout cela ?
Trois choses
1°) Notre Dieu est un Père qui nous aime, comme le père de l’enfant prodigue .Quelles que soient nos fautes, dès que nous revenons vers lui, il nous réintègre dans l’intimité de son amour, il ne cherche pas à nous juger et encore moins à nous condamner. Il n’a qu’une idée en tête : nous pardonner et nous faire rentrer à nouveau dans l’intimité familiale .
2°) Le repentir n’est pas seulement le regret des fautes passées, il nous amène jusqu’à changer désormais notre manière d’agir Il est donc tourné aussi vers l’avenir.
3°) Le prodigue a eu le courage de retourner vers son père et lui demander pardon.Et ce pardon, non seulement a effacé ses fautes passées mais l’a relancé à nouveau dans la paix et le bonheur de la vie de famille retrouvée Aujourd’hui encore le Seigneur nous guette, comme le père de l’enfant prodigue guettait le retour de son fils, pour nous accorder son pardon dans le sacrement de réconciliation, par lequel il efface nos fautes passées, et, transfèrant son coeur dans le nôtre, il nous donne sa force pour redémarrer et changer de vie ainsi que l’explique le prophète Ezechiel : Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifié …je mettrai en vous MON esprit et je ferai que vous marchiez selon mes lois. (Ez.36,26,27)Mais, aurons nous le courage, comme le prodigue, d’aller demander ce pardon et chercher la vie nouvelle que le Seigneur veut nous donner ?