Dimanche 20 août

20ème dimanche du temps ordinaire – Année A – Mt 15, 21-28

«  Femme, grande est ta foi ! »

Jésus se trouve en territoire païen, dans la région de Tyr, au nord de la Palestine. Une Cananéenne survient et le supplie à grands cris de délivrer sa fille possédée par un démon. Mais il l’éconduit, justifiant son attitude en disant « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël. » C »‘est curieux ! Dans l’évangile il ne se montre jamais chauvin ni raciste. Au contraire, il ne rate aucune occasion de louer la foi des étrangers, par exemple celle du Samaritain, seul parmi les dix lépreux guéris à venir le remercier (Luc 17,19 ) ou celle du centurion romain qui demande à Jésus de ne pas se déranger pour venir jusque chez lui :« Dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri » (Mt.8,5) Il tient alors à souligner qu’il n’a jamais vu une telle foi en Israël et il va jusqu’à dire aux Juifs présents : »De l’orient et de l’occident les étrangers viendront prendre place au festin du Royaume, tandis que vous, les héritiers du Royaume, vous serez jetés dans les ténèbres (Mt.8,11,12).

Alors pourquoi éconduit-il la Cananéenne ? Je vois deux raisons à cela. La première, c’est que c’est vrai qu’il est envoyé d’abord aux Juifs d’Israël. D’ailleurs la première fois qu’il envoie ses apôtres en mission, il leur recommande de ne pas aller chez les païens, de ne pas entrer dans une ville de Samaritains, mais d’aller plutôt vers les brebis perdues d’Israël. (Mt.10,5,6) Mais par la suite, il les enverra auprès de tous, sans exception. La vraie raison pour laquelle il repousse la requête de la Cananéenne, c’est qu’il veut provoquer cette femme à exprimer sa foi de manière plus vive, ce qu’elle fait avec beaucoup d’à propos. Comme Jésus écarte sa supplication en lui disant : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de les jeter aux chiens, » elle rétorque : »Oui, Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table » Le Seigneur, tout heureux reprend alors : »Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu veux. »C’est dire que le miracle n’est pas tant une initiative de Jésus qu’une réponse à quelqu’un qui sollicite quelque chose avec foi. C’est la foi qui déclenche le miracle. Et si la personne qui demande n’a pas la foi, il n’y a pas de miracle, comme le soulignent St Marc et St Mt qui nous rapportent comment Jésus en visite à Nazareth « ne fit pas là beaucoup de miracles, parce qu’ils ne croyaient pas . » (Mt.13,58)

Mais qu’est-ce que c’est exactement qu’avoir la foi ? Avoir foi en Dieu, c’est avoir confiance en lui, ce qui suppose qu’on a une certaine connaissance de lui et qu’on l’aime. Mais nous ne pouvons pas connaître Dieu par nous-mêmes. La foi est donc un don de Dieu, nous ne pouvons pas l’acquérir par nous-mêmes. Notre intelligence et notre raison sont trop courtes pour l’atteindre « Haut est le ciel au-dessus de la terre. Aussi hautes sont mes voies au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées » (Is.55,9) dit l’Ecriture. Il faut que Dieu se révèle pour que nous le connaissions. Ce qu’il a fait depuis les temps les plus anciens Il s’est fait connaaître de nous d’abord par les Sages et les Prophètes puis par Jésus Christ et l’Esprit Saint qui nous a été communiqué. Désormais Dieu n’est plus loin de nous. Non seulement il s’est approché, mais il est en nous. Par les sacrements, en particulier le baptême et l’Eucharistie nous sommes en communion avec lui. De sorte que nous pouvons connaître ses lois et sa volonté. Déjà, l’auteur du Deutéronome, il y a environ 2.700 ans, écrivait : « Cette Loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-delà de tes moyens ni hors de ton atteinte. Elle n’est pas dans les cieux qu’il te faille dire : qui montera pour nous aux cieux nous la chercher, que nous l’entendions pour la mettre en pratique. Elle n’est pas au-delà des mers qu’il te faille dire : qui ira pour nous au-delà des mers nous la chercher, que nous l’entendions pour la mettre en pratique. Car la Parole est tout près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton coeur pour que tu la mettes en pratique. » (Deut.30,11-14).

Mais comment repérer cette parole de Dieu qui est en nous, dans notre coeur pour nous faire avancer dans la connaissance et l’amour de Dieu ? En étant très attentif à nos pensées et mouvements intérieurs. Habituellement nous savons reconnaître en nous les idées, les élans, les désirs, qui nous poussent au mal. Nous les appelons des tentations, oeuvre du démon en nous. Mais, il y a aussi en nous des idées, des élans , des désirs, des envies qui nous poussent au bien. Malheureusement nous ne savons pas reconnaître que c’est là l’oeuvre de Dieu en nous. La preuve en est que si vous demandez à n’importe quel bon chrétien : quand est-ce que le Seigneur vous a parlé pour la dernière fois, il ne sait pas quoi répondre. Mais si vous lui demandez : quand est-ce que le démon vous a tenté pour la dernière fois, il voit tout de suite quoi dire !

Pourquoi ne savons nous pas reconnaître les paroles que Dieu nous adresse ? Peut-être parce que nous n’osons pas croire que Dieu communique avec des gens ordinaires comme nous. Avec le pape, peut-être , ou avec de hauts responsables de l’Eglise, mais avec des gens ordinaires comme nous……Pourtant dans l’Evangile, ce sont des gens ordinaires, parfois même des gens de mauvaise réputation comme Zachée ou Marie Madeleine que le Christ fréquente. Ses préférés qu’il choisit comme apôtres, sont des pécheurs du lac, pas très instruits, pas du tout le haut du panier ! Tandis qu’il n’aime pas beaucoup les prêtres, les docteurs de la Loi et toute la hiérarchie de l’Eglise Juive. Par conséquent il faudrait peut être nous mettre à faire sérieusement attention : si quelque chose nous apprend quelque chose sur Dieu, nous rapproche de Dieu, que ce soit en priant, en écoutant une homélie, en voyant quelque chose dans la rue, ou à la télé, en parlant à quelqu’un, en lisant un journal ou un livre ; si une idée, un désir, une élan surgit en nous qui nous pousse à faire le bien, attention, il y a là une parole de Dieu qui nous est adressée. Il ne faudrait pas que le Christ puisse nous reprocher comme aux Juifs « Pourquoi ne comprenez-vous pas mon langage ? (Jean 8,43)

Que retenir de tout cela ? 

En exauçant cette femme étrangère, païenne, le Seigneur manifeste qu’il ne s’intéresse pas seulement ses fidèles proches, mais à tous les hommes, même ceux qui sont encore loin de lui. Personne n’est laissé de côté. D’autre part l’évangile d’aujourd’hui nous montre que c’est notre foi , notre confiance en lui qui touchent le Seigneur et l’amènent à exaucer nos prières, comme nous le voyons avec la Cananéenne qui a obtenu la guérison de sa fille .

Mais la foi est un don de Dieu. Nous ne pouvons pas nous la procurer par nous mêmes. Notre intelligence et notre raison sont trop courtes. Mais le Seigneur nous la communique par la voix de son Esprit présent en nous depuis notre baptême. Il est donc extrêmement important que nous sachions l’accueillir. Soyons donc très attentifs à nos mouvements intérieurs pour repérer les idées qui surgissent en nous et nous rapprochent de Dieu, ainsi que les désirs, les élans qui nous poussent vers le bien. Le jour de l’Ascension il nous a assuré :« Moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. » ( Mt 28,20) Mais nous, somme nous toujours avec lui ?