Nativité du Seigneur – Année A – Mt 1,18-24
« Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous. »
Nous fêtons aujourd’hui la venue du Christ parmi nous. Pourquoi vient-il ? Pour nous apporter le pardon et la réconciliation avec le Père. Les hommes en effet avaient rejeté Dieu, ils s’étaient laissé avoir par le démon qui leur avait fait croire que s’ils laissaient tomber toutes ces histoires de religion, de commandements de Dieu, non, ils ne mourraient pas, au contraire, ils seraient comme des dieux, décidant par eux mêmes de ce qui est bien et de ce qui est mal. Evidemment, ça n’a pas marché. Car le péché, qui est une offense faite à Dieu, est aussi la source de tous nos malheurs.Comme il le dit à Jérémie : « Est-ce bien moi qu’ils blessent avec leurs péchés n’est-ce pas plutôt eux-mêmes, pour leur propre confusion ?« (7,29 ) Encore aujourd’hui nous voyons toutes les injustices, les souffrances, les ruines, les violences, les crimes, les massacres qu’entraîne le péché. Mais parce qu’il nous aime, le Seigneur n’a jamais envisagé de se venger ou de nous punir. »Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère car je suis Dieu et pas homme et je n’aime pas à détruire« confie-t-il à Osée (11,9 ) Mais pourquoi veut-il nous pardonner et nous réintégrer dans son intimité ? Cela ne lui rapporte rien, il n’a besoin de rien. C’est vrai, mais parce qu’il est Amour, c’est plus fort que lui, il ne peut pas rester tout seul à profiter de sa vie éternelle et de son bonheur infini. Il veut partager tout ce qu’il a et tout ce qu’il est avec nous. C’est ça Noël, le mystère de Dieu qui nous aime tant qu’il se fait homme pour que l’homme puisse partager sa vie et son bonheur éternels.
On peut quand même se demander pourquoi il a voulu se déplacer en personne et venir jusqu’à nous. Ce n’était pas nécessaire, il aurait pu envoyer un prophète à sa place ou nous annoncer son pardon du haut du ciel. De même qu’un jour une voix venue du ciel annoncera « Celui ci est mon fils bien aimé, écoutez le« (MT.3,17) la même voix aurait pu annoncer « Sachez qu’à partir d’aujourd’hui, moi, Dieu, je vous pardonne ». Mais Il n’a pas voulu pardonner avec des mots seulement, cela eût été en quelque sorte trop superficiel. Il ne veut pas d’un pardon qui serait comme une couche de peinture propre plaquée sur un mur sale, mais le mur reste sale en dessous. Il a voulu d’un pardon quinon seulement efface les péchés en surface, mais qui purifie le pécheur en profondeur, ainsi qu’il l’avait annoncé il y a plus de 2.600 ans au prophète Ezechiel : « Je vous donnerai un coeur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, je mettrai en vous mon esprit et je ferai que vous marchiez selon mes lois et que vous observiez et suiviez mes coutumes.« (36,26) C’est pour ça que le Christ a voulu se faire homme. En se faisant homme, il fait rentrer la divinité dans l’humanité. En Jésus, Dieu et l’homme sont un. Désormais « à tous ceux qui le reçoivent et qui croient en son nom est donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu.« (Jean 1,12) Désormais peuvent devenir fils de Dieu, comme le Christ ceux qui le reçoivent. Car cette adoption divine n’est ni automatique ni obligatoire. En amour, on ne force pas. Il faut que nous fassions la démarche de demander à recevoir la vie de Dieu par le baptême.
Le drame c’est qu’Il est venu chez lui et que les siens ne l’ont pas reçu. Pourtant, Il a tout fait pour ne pas nous effrayer. Il n’est pas apparu au milieu du tonnerre et des éclairs, il n’est pas apparu dans le triomphe de sa gloire comme le jour où il s’est montré transfiguré à trois de ses apôtres. Il est arrivé dans une extrême discrétion. Dans une une grotte qui servait d’étable. Un nouveau né couché dans une mangeoire. La prochaine fois que vous verrez un petit bébé dans son berceau, regardez bien. Il a voulu apparaître comme ça. C’est certainement autour d’ un berceau qu’on peut le mieux saisir l’énormité de ce geste, l’énormité du mystère de Noël. Parce qu’enfin s’il voulait se faire homme, il aurait pu apparaître comme un personnage important, un notable, un grand prêtre faisant des déclarations solennelles quelque part dans le Temple de Jérusalem, mais pas dans une étable. Et s’il avait des choses à dire, un enseignement
à donner, il aurait tout de même pu attendre l’invention de l’imprimerie , du téléphone, d’internet et des ordinateurs. Le créateur du ciel et de la terre qui se fait petit enfant , petit bébé, venant au monde à une époque reculée, à l’écart d’un village perdu, dans une grotte qui servait d’étable… … Il faut être Dieu pour avoir des idées pareilles. Qu’est-ce que ça veut dire ? On ne peut pas descendre plus bas. Comme ça, il ne laisserait personne en dessous. Il ne joue pas au Dieu avec nous.
Tout ce mystère de Noël, la naissance virginale, le Tout Puissant qui se fait petit enfant, ce n’est pas étonnant que beaucoup n’y croient pas. Pour eux tout cela, c’est de l’ordre des légendes et des contes de fées. Cela leur paraît trop beau pour être vrai. Leur médiocrité trop épaisse ne laisse pas pénétrer une telle qualité d’amour et de délicatesse. Finalement, leur incrédulité rend témoignage à la grandeur et à la tendresse du Seigneur qui nous dépassent tellement que nous n’arrivons pas à admettre que ce soit possible.
Mais pour tous ceux qui croient en ce Dieu invraisemblable, Noël est une espérance folle. La naissance du Messie dans l’étable de Bethléem, c’est Dieu qui se met au niveau des plus bas, au niveau des plus pauvres et nous relève tous. Il ne laisse personne en dessous.Il s’abaisse jusqu’à notre humanité pour rehausser notre humanité jusqu’à sa divinité. Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu. Cette expression de St Irénée est la plus juste qu’on ait jamais trouvé pour définir le mystère de Noël » Il a fait de nous des êtres nouveaux en Jésus Christ écrivait St Paul aux Ephésiens, en vue des oeuvres bonnes qu’il avait préparées à l’avance pour que nous les accomplissions.« (Eph.2,10) C’est cela la joie de Noël, beaucoup plus que l’attendrissement sentimental autour d’un petit poupon dans son berceau. La joie de Noël, c’est un nouvel élan, un renouveau pour les hommes désormais recréés de l’intérieur, relancés, renouvelés, désormais uns avec Dieu qui est en eux et « dont la puissance agissant en eux peut faire bien plus, infiniment plus que tout ce que nous pouvons désirer ou imaginer.« (Eph.3,20) comme dit St Paul. Tous les espoirs sont permis. Avec Dieu en nous, il n’est rien que nous ne puissions faire .C’est pour cela que cette nuit là à Bethléem « une troupe céleste louait Dieu en disant « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime.«
Que retenir de tout cela ?
Noël c’est beaucoup plus que l’histoire touchante du petit Jésus. C’est même beaucoup plus que le mystère de Dieu qui se fait homme. Comme l’a dit St Irénée, c’est le mystère de Dieu qui se fait homme pour que l’homme soit fait Dieu. Pour la première fois en Jésus un homme est à la fois Dieu et homme. Et tous ceux qui l’accueillent sont transformés en lui.
Il n’a pas joué au Dieu avec nous. On ne peut pas s’abaisser plus qu’il ne l’a fait. Il ne laisse personne en dessous. Il vient pour entrer en chacun de nous. Laissons le entrer. Si nous l’accueillons, alors forts de sa divinité qui habite en nous, nous pourrons tout en celui qui nous fortifie. et changer notre monde de violences en un monde de paix, de justice et de charité.
C’est cela la joie de Noël, la folle espérance de Noël. Le monde, encore plein d’injustices, de violences et de malheurs a besoin de nous, besoin de Lui, besoin de Lui en nous. Il n’est pas venu pour que tout continue comme avant mais pour que tout recommence mieux qu’avant. Ce soir, tout pourrait recommencer mieux qu’avant. Cela dépend de nous. Il y a 2.000 ans « il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reçu.« (Jean 1,11). Ce soir, tout pourrait changer. Cela dépend de nous. « Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je serai près de lui et lui près de moi.« (Apoc. 3,20 ) Alors qui oserait le laisser dehors ?