Dans cet évangile, le Christ nous dit trois choses :
1°) Je suis le pain de vie qui donne la vie éternelle.
2°) Ce pain de vie, c’est moi donnant ma vie pour la vie du monde.
3°) Si vous mangez de ce pain, vous avez la vie éternelle et si vous n’en mangez pas, vous n’avez pas la vie.
Je suis le pain de vie. Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Et Jésus précise : le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde. Ce qui veut dire que quand nous recevons la communion, nous ne recevons pas le petit Jésus de Bethléem ou le Christ parcourant la Palestine en prêchant l’Evangile, nous recevons le Christ qui donne sa vie pour nous sur la croix et nous donne accès par sa mort et sa résurrection à la vie éternelle, le péché, le mal et la mort ayant été vaincus par la puissance infinie de son amour dont rien ne peut venir à bout. Même quand on est en train de le tuer, il prie encore pour ses bourreaux : Père, pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font (Lc 23,43). Autrement dit, vous pouvez me tuer si vous voulez, moi, je vous aime encore. St Paul dira fort justement : Rien, ni la mort, ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les forces des hauteurs ni celles des profondeurs ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en J.C. (Rm 8,38). C’est en donnant sa vie pour nous que le Christ nous a donné accès à la vie éternelle. Pour nous aujourd’hui, c’est en recevant le sacrement du Christ donnant sa vie, que nous avons accès à la vie éternelle. Mais il n’y a pas de magie et encore moins de sorcellerie là-dedans. Il ne suffit pas de manger une hostie, pour avoir la vie éternelle, encore faut-il faire communion avec le Christ en recevant cette hostie. Je fais communion avec le Christ lorsque je vais recevoir l’hostie en sachant bien que je vais recevoir le corps du Christ livré pour moi en vue de faire comme lui, afin de donner ma vie pour les autres, afin de recevoir la force de de donner ma vie pour les autres jour après jour. La sainte communion, ce n’est pas quelque chose que le Christ ferait en nous sans nous, comme automatiquement. La sainte communion, c’est la rencontre du Christ donnant sa vie qui vient vers nous… et de nous qui allons vers lui avec le désir et la volonté de faire comme lui et de donner nous aussi notre vie pour les autres. Si je n’ai pas ce désir et cette volonté de faire comme lui, de donner moi aussi ma vie pour les autres, je pourrais manger un plein ciboire d’hosties, je n’ai pas la vie éternelle, je n’ai rien de commun avec le Christ, je ne suis pas chrétien. Donner sa vie pour les autres, ce n’est pas quelque chose de facultatif pour un chrétien. Je peux être un bon chrétien, que je dise mon chapelet ou non, que je fasse des pèlerinages ou non, mais je ne peux pas être chrétien, si je ne donne pas ma vie pour les autres. Voilà qui peut paraître terriblement exigeant. En fait donner sa vie pour les autres, grâce à Dieu, cela ne veut pas dire nécessairement mourir pour eux sur une croix Le simple service des autres, c’est déjà donner sa vie pour eux. Or, à longueur de journée, à travers tout ce que nous faisons, il y a presque toujours un service des autres, même si nous n’en sommes pas conscients. Dans toutes les professions, dans toutes les sortes de devoir d’état, il y a une dimension de service des autres. Un commerçant, épicier ou boulanger dépanne les gens du quartier, un médecin ou une infirmière sont au service des malades, que l’on soit enseignant ou conseiller municipal, ingénieur ou manoeuvre sur un chantier, député ou architecte, on travaille toujours pour les autres. Et que dire d’une femme au foyer ! Est-ce que nous réalisons tout ce qu’il y a comme service des autres et même comme don de soi dans sa vie, elle qui, du matin au soir se consacre au bien-être de tous dans la maison ?Presque toujours on ne regarde le travail que comme source de revenus. A tel point que l’on dit couramment d’une femme au foyer qu’elle ne travaille pas ! sans se rendre compte de l’énorme stupidité d’une telle affirmation ! Que le travail soit source de revenus, très bien, et il faut souhaiter que tout le monde puisse se procurer par son travail un salaire confortable qui lui permette et qui permette à sa famille de vivre correctement. Mais il y a dans le travail d’autres aspects plus importants : outre la dimension de service dont nous venons de parler, il y a le facteur d’épanouissement personnel. J’ai rencontré un jour quelqu’un qui avait décidé d’abandonner la très bonne situation qu’il avait à Paris dans le commerce de luxe sur les Champs Elysées parce que ce travail ne donnait pas de sens à sa vie. Mais il y a aussi la dimension spirituelle du travail dont malheureusement nous avons bien trop rarement conscience. Dans n’importe quel travail on utilise toujours l’intelligence et les talents de toutes sortes que le Seigneur nous a donnés et de plus on collabore au développement et à l’épanouissement de la création. Il existe un grand nombre de litanies de louange pour la beauté de la création, pour les fleurs, les animaux, les océans, les montagnes, les océans et les rivières. Peut-être pourrait-on créer de nouvelles litanies de louange pour les réalisations des sciences et des techniques, pour les voitures et les avions, le téléphone et l’informatique, les TGV et les voyages interplanétaires, pour l’eau courante et l’électricité, qui sont à notre disposition tous les jours.
Que retenir de tout cela ?
Donner sa vie pour les autres, c’est ce qu’a fait le Christ. Etre disciple du Christ, c’est donc aussi et nécessairement donner sa vie pour les autres. Lui, Jésus a donné sa vie pour nous, nous aussi nous devons donner notre vie pour nos frères nous dit St Jean dans sa seconde épître. (2 Jn 3,16) Et pour que nous puissions y arriver, malgré l’égoïsme qui chaque jour essaye de nous renfermer sur nous-mêmes, le Christ a inventé le sacrement de son corps livré pour nous, le pain de vie, nous avertissant on ne peut plus clairement : Si vous ne mangez pas de ce pain , vous n’avez pas la vie en vous, celui qui mange de ce pain a la vie éternelle en lui. La volonté du Seigneur, c’est que nous recevions la communion afin d’avoir la force de mettre chaque jour notre vie au service des autres. On peut être chrétien et ne pas réciter son chapelet. On peut être chrétien et ne pas aller en pèlerinage ici ou là. Mais on ne peut pas être chrétien si on ne donne pas sa vie pour les autres. C’est un programme très exigeant mais qui ne demande pas nécessairement d’être héroïque du matin au soir. Le don de soi pour les autres nous le pratiquons à travers presque tout ce que nous faisons à longueur de journée que ce soit dans l’exercice de notre profession ou dans notre vie de famille où il y a toujours une dimension de service des autres. Il n’y a pas un seul père de famille qui travaille uniquement pour lui. C’est pour les siens et pour d’autres encore autour de lui qu’il s’échine au travail. Et que dire d’une femme au foyer ? Tout ce qu’elle fait du matin au soir, ce n’est pas pour elle mais pour sa famille, son mari, ses enfants. Ce n’est du don de soi, ça ? Malheureusement nous sommes généralement incapables de voir le don de soi pour les autres qu’il y a dans nos activités et nos travaux de chaque jour et nous n’en voyons pas la valeur devant Dieu. Il est donc urgent de nous convertir, de cesser de regarder nos travaux comme des tâches matérielles et profanes. Exerçons nous à voir la dimension de service des autres qu’il y a dans nos gestes de tous les jours, nous rappelant la parole du Christ ce que vous aurez fait pour le plus petit d’entre les miens, c’est pour moi que vous l’aurez fait. (Mt.25,40)